Lawrence Carroll — Galerie Karsten Greve
La galerie Karsten Greve présente la fascinante transition du travail du peintre sexagénaire Lawrence Carroll. Passé du minimalisme au figuratif, l’Australien, dont l’atelier est aujourd’hui établi à Venise, expose des toiles comme autant de vanités rappelant la disparition de son père. Une splendeur.
« Lawrence Carroll — Nothing Gold Can Stay », Galerie Karsten Greve du 8 juin au 3 août 2013. En savoir plus Deuil. Disparition. Les douleurs vives de Lawrence Carroll ont trouvé formes et représentations. Pour cela, le peintre a choisi d’oublier le minimalisme pour laisser place à des créations toutes personnelles faites de papiers peints aux motifs fleuris agrafés à même la toile sur un châssis de bois volontairement non professionnel. Ces châssis très épais aux angles biscornus et irréguliers semblent signer l’antithèse de la perfection, ô combien touchante où la main de l’artiste reste encore visible. A cela, Carroll ajoute des bouquets de fleurs en tissu peint qu’il trouve çà et là et stocke dans son atelier avant de leur trouver une place. Papiers peints fleuris badigeonnés de cire, roses fanées collées à même la toile crient de concert la vanité. Il explique lui-même que la figuration s’est imposée à lui au moment où il trouva dans le motif floral l’incarnation de la vie triomphante. Celle qui pousse au-dessus des tombes et croît dans la terre qui recouvre les morts.Il ne faudrait pas se méprendre, rien dans ce parcours ne suggère le morbide ou l’absence noire qui taraude. Au contraire, la première impression est plutôt joyeuse, claire et lumineuse évoquant parfois les murs défraîchis d’une maison de campagne familiale qui aurait vu passer plusieurs générations. Cette dimension du temps qui passe est essentielle dans sa création récente, il est ainsi important pour lui de laisser filer les années avant de mettre un point final à ses œuvres.
Papiers peints fleuris badigeonnés de cire, roses fanées collées à même la toile crient de concert la vanité.
La patine doit faire son effet, la cire doit sécher, les couleurs doivent se défraîchir. Mais l’œuvre, elle, vit malgré le fait qu’elle exsude de cette ombre évidente qu’est notre finitude. Plus loin, ses dessins auxquels il appose de nombreux collages sont imprégnés de l’influence de Cy Twombly, qu’il a connu. Tissées de souvenirs et de symboles d’événements qui ont marqué Carroll, ces toiles de grand format mettent à nu un artiste qui a vécu le deuil d’un être proche et sut le sublimer. Le minimalisme n’aura pas répondu à ses attentes, il fallut passer par la figuration pour montrer les blessures merveilleusement symbolisées par les agrafes qui parcourent ses toiles, un peu à la façon dont une poupée oubliée trouverait une main pour la rafistoler.