Olivier Mosset, Collaborations — Centre culturel Suisse
Le plus américain des Helvètes, installé à Tucson, expose jusqu’au 30 mars ses œuvres réalisées en collaboration avec plusieurs artistes, tels que Madjid Hakimi, Bertrand Lavier, Jacob Kassay, Alix Lambert, Jeffrey Schad & Vincent Szarek ou encore Marie-Agnès Gillot. Il en résulte un parcours passionnant où l’empreinte de cet ancien assistant de Tinguely est à la fois partout et nulle part.
« Olivier Mosset — Collaborations », CCS — Centre culturel suisse du 17 janvier au 30 mars 2014. En savoir plus Olivier Mosset se montre sous un jour nouveau. Auréolé et comme recouvert d’une altérité qui n’enlève rien à la strate originelle. Mélange subtil dans lequel il est ludique de distinguer la paternité de Mosset. Par touches, et dans l’ensemble, il est donc bien là. Avec Madjid Hakimi, on le sent revenir à ses cercles neutres, objets visuels dont il est coutumier. Cercles, ou plutôt ronds lumineux, disposés en corolle au fond d’une salle plongée dans le noir. Jusqu’à eux, on progresse, boitillant, attirés comme des insectes par la lumière, avec la peur certaine de tomber. Perte de repères, nous sommes réduits à une rétine. Happés.Dans la salle suivante, Mosset s’amuse avec Bertrand Lavier à créer un espace aux couleurs vives qui nous rappelle la puissance radicale de ses monochromes peints autour de 77 dans un New-York baigné d’abstraction. Le couple Lavier / Mosset est éminemment abouti. Les deux se rejoignent évidemment sur le dépassement duchampien tout autant que sur le statut de la peinture-objet. En vis-à-vis, un miroir reflète les deux couleurs primaires utilisées par Lavier et Mosset, baignant toute la pièce dans un halo à la belle franchise tonale. Sur le miroir, en son milieu, une barre de danseuse a été apposée. Jacob Kassay signe sans doute avec Mosset le plus surprenant duo. Où sont les petits rats de l’Opéra ? La salle de danse est prête, il n’y a plus qu’à aligner les grands battements, les arabesques et les pirouettes.
Au milieu de la pièce trône la création de Mai-Thu Perret, inspirée par une œuvre de Donald Judd qu’elle avait découverte accompagnée de Mosset, à Marfa (bourgade du Texas où Donald Judd a installé un grand centre d’art, la Fondation Chinati dans un ancien dépôt d’artillerie). Dans cette sculpture, tout l’esprit de cette aventure artistique plantée au milieu du désert texan jaillit ; le matériel brut du dépôt, l’ambiance de friche, l’esprit container. Comme une œuvre prête à partir dans un train de marchandises au milieu d’autres choses et dont l’existence n’aurait rien de sacrée.
En bas, dans la cour intérieur, on croirait voir Giulietta, l’Alfa Romeo de Lavier, en moins accidentée. Ici, la carrosserie de cette Chevrolet est rutilante, d’un kitsch nacré, signé Jeffrey Schad et Vincent Szarek qui transforment à eux trois la cour du Centre culturel Suisse en concession automobile drolatique.
Distance et humour rappellent en filigrane que Mosset n’a rien oublié de ces années BMPT, quatuor artistique éphémère en révolte contre l’institution, créé avec Buren, Parmentier et Toroni en 66 puis dissout en 67. Rien oublié non plus de sa radicalité qui irrigue tout le parcours, aussi radicalement drôle que drôlement radical.