Eloïse Van der Heyden — Galerie Catherine Putman
Eloïse Van der Heyden fait de la forêt de Fontainebleau son terrain d’expérimentation, de collectes de matières et d’empreintes. Proche de son atelier, ce milieu naturel est également le lieu où elle recueille les fruits de ses promenades pieds nus au contact du vivant végétal. Sa démarche artistique renoue avec l’envie de prendre le temps d’être proche d’une nature encore sauvage. Ses œuvres sont chargées de récits, de mythes et nous invitent à interroger la conscience de notre environnement et la fragilité de nos espaces naturels.
Le parcours nous plonge ainsi dans une atmosphère de ruine après un feu de forêt. À partir de troncs d’arbres calcinés, elle crée des empreintes directes qui révèlent des textures et couleurs de ces êtres, à préserver. Une robe en papier enfumé suggère une présence étrange, tel un fantôme. Une œuvre au mur de teintes grises renvoie une lumière, celle d’un renouveau. Des rochers récoltés s’ajoutent à ce paysage entre obscurité et arrivée du jour.
Comme leur pendant plus coloré et empli d’un possible mystère, l’ensemble de céramiques compose une constellation bleue et fait écho aux cieux. Par leur traitement, ses sculptures sont proches de ses œuvres en papier, matières et techniques qui rappellent le cycle de la nature. L’artiste prend le temps d’expérimenter des matières et médiums pour saisir et capter le moment fragile qui précède toute bascule. Des bois de cerf réalisés par empreinte apparaissent comme seuls vestiges d’un bouleversement naturel parcouru de traces humaines dans la forêt.
Dans le cabinet d’art graphique, l’artiste propose une ambiance plus chaleureuse et onirique. Ses dessins sur papier Japon présentent des jeux de couleurs pastel, tel un ciel après la tempête ou un autre phénomène climatique. Elle y laisse parler les végétaux et les animaux et transmet les désirs cachés ainsi que le besoin d’une connexion avec les êtres vivants non-humains. Des gestes sensuels se découvrent de façon subtile dans ses sculptures, semblables à des figures de légendes et d’histoires collectives qui traversent les époques. Ses œuvres font surgir des souvenirs d’exploration en forêt et nous rappellent à nos envies enfouies tout comme la nécessité d’ouvrir nos sens, d’être en éveil face à la beauté des petits riens de la nature, avant que ceux-ci ne disparaissent.
Une robe en papier bleu, miroir lumineux de la première calcinée semble ouvrir une brèche dans le parcours et lui proposer une conclusion en forme de lueur d’espoir, tel un corps qui résiste et redonne la vie, suggestion d’un monde merveilleux à venir. Au mur, un poème écrit à la main constitue des traces d’une pensée en mémoire.
Pour Eloïse Van der Heyden la forêt est aussi le lieu d’une conscience de soi, d’un retour aux sources et au sauvage qui est encore en nous. Ses œuvres en papier et ses céramiques ici réunies nous ouvrent ainsi les voies vers des vestiges d’une nature, en perpétuelle transformation et qu’il est urgent de soigner.