Matthieu Palud — Les Bains-Douches, Alençon
Tantôt fuyants, tantôt fixes, les yeux des sujets du peintre Matthieu Palud semblent répondre aux dérives de son propre regard sur la peinture, aux bifurcations qu’elle emprunte. Les Bains-Douches d’Alençon présentent une exposition personnelle de l’artiste.
Restreinte et aérienne, la sélection d’œuvres présentée aux Bains-Douches d’Alençon laisse vivre le silence et l’humilité de compositions qui capturent un souffle suspendu de l’époque, comme neutralisé par une forme d’apathie. Dans cette sobriété presque conceptuelle, la manière change mais le décalage reste ; natures mortes, intérieurs, portraits, chaque sujet appelle un geste, une technique et une forme de représentation singulière qui fait de la pratique même du peintre et de sa mise en acte un enjeu toujours recommencé de la représentation.
D’où sans doute cette vibration, changeante mais dans chaque œuvre répétée, d’un sujet central chargé de toute la volonté et le désir de l’artiste d’en déplacer l’existence sur la toile, quitte à neutraliser ce qui l’entoure. Dans ses intérieurs, toute fuite paraît vaine ; en portrait, les autres vies possibles (symbolisées par les fenêtres) deviennent de simples motifs d’une architecture qui pourrait elle aussi se fondre dans le corps.
La composition semble s’émanciper et la création affirme son emprise sur le créateur. La technique, devenue véritable sujet de réflexion, participe de la lutte engagée dans chaque nouvelle toile. C’est alors l’exposition en elle-même, la mise en espace des derniers travaux, qui figurerait presque la suspension, embrassant symboliquement sa réalité physique.
Alors le temps, “récent”, comme la première qualité de ses œuvres, devient bien le sujet central d’une exposition qui apparaît, in fine, comme un souffle, un lieu de décompte, dont toutes les images se font témoin, des batailles engagées avec la peinture.