Thibault Hazelzet à la galerie Christophe Gaillard
Les photographies de Thibault Hazelzet, peintre de formation et depuis peu sculpteur, ne se nourrissent pas du réel. Résolument expérimentales, ses épreuves évoquent tour à tour des tableaux abstraits ou encore de l’encre sur plaque de verre qui aurait perlé de son imagination. Déroutant autant que captivant.
Thibault Hazelzet — La parabole des aveugles @ Christophe Gaillard Gallery from November 29, 2012 to January 12, 2013. Learn more Hazelzet semble se servir du médium photographique pour mieux s’en éloigner. De l’enregistrement du réel permis par ce dernier, il n’aura que faire. Seules traces du monde qui défilent sous son objectif, ses sculptures qui lui ont servi de modèles, disposées pour l’occasion au sous-sol, dans la cave de la galerie. Figurines ou étranges totem de bois aux contours volontairement grossiers qui semblent ancrées dans le sol et prêtes à se déplacer. Vivantes formes monolithiques qui habitent les tirages d’une grâce indescriptible formant un monde où l’échelle est incertaine. L’oeil nagera en eaux troubles sans pouvoir cerner la dimension des objets photographiés, hésitant, doutant sans cesse.De cette indétermination naît une ambiguïté de la discipline d’une très riche nature qui apparente ses tirages négatifs et positifs, installés en diptyque, à des tableaux à l’abstraction délicate, rehaussée de touches de couleurs dans les tons verts et bleus. Par son oeil, les sculptures sont transfigurées et de leur existence ne subsiste sur le papier que quelques traits noirs ou blancs, lignes épaisses qui semblent dire que ces images du monde ont été rêvées. L’univers de Thibault Hazelzet tient en effet beaucoup de la chimère, et plus encore de l’aveuglement. Ce récent travail s’inspire à cet égard du tableau de Pieter Bruegel l’Ancien La Parabole des aveugles, dont le tragique de situation est bien connu. Dans ce célèbre tableau (1568), tiré de l’Évangile selon saint Matthieu, on assiste à la perte programmée d’un cortège de malvoyants, s’apprêtant sous nos yeux à tomber dans un gouffre. Un aveugle ne peut guider un autre aveugle.
Comme eux, nous sommes happés, engloutis par l’image qui se dérobe à nous, ne cherche aucunement, fort heureusement, à nous guider vers le sens. Mais du noir, perce la lumière, lorsque l’on remonte de cette cave, comme d’une caverne platonicienne, le regard ressort vierge et heureux de n’avoir rien su voir.