Jochen Lempert — Centre Pompidou
De formation scientifique, biologiste et spécialiste des libellules, Jochen Lempert (1958) est stimulé par sa fine attention à la biodiversité végétale et animale. Le Centre Pompidou lui consacre jusqu’au 4 septembre une rétrospective au sein de la Galerie de photographies.
Déjà présenté au Château de Rochechouart en 2018, l’œuvre de Lempert se déploie au sein d’un accrochage élégant et plein de finesse, invitant à regarder avec précision ses pièces. Trois sections dans cette exposition, Physionomies / Morphologies, où il met en évidence des symétries et des correspondances — Bioluminescence où se révèle la grâce d’apparitions lumineuses — Perception, autrement dit son émerveillement au quotidien. Son exposition est conçue comme une installation dans laquelle les images, de différents formats, sont montrées sans cadre, en constellation. Les vides créent des aires de respiration, propices à une circulation du regard. Dans des vitrines, nous approchons les détails d’une nature en mouvement, de fruits, de légumes, d’animaux, de formes naturelles dans la lumière. Pas de classement mais bien de possibles mises en perspective qui naissent dans une relation de proximité aux images de différentes périodes. L’artiste a conçu lui-même la scénographie, les mises en parallèle de ses photographies composent ainsi au long du parcours une histoire naturelle.
L’artiste nous amène à contempler le vivant furtif et fragile, à mieux le comprendre. D’où la nécessité de s’octroyer du temps pour admirer les traces apparaissant dans le ciel et méditer face aux formes humaines, végétales et animales. La lumière, au cœur de sa pratique artistique, se révèle dans l’accrochage précis qui reflète la fascination du photographe pour les manifestations lumineuses. L’expérience esthétique de rayons de lumière ou la puissance d’un éclat de soleil nous touchent alors d’autant plus et en stimulent tout autant nos sens.
La force du travail artistique de Lempert tient également de son admiration pour les formes du vivant. Les frontières entre art et science s’estompent progressivement. Il n’est pas tant question de reconnaître les espèces photographiées mais plutôt d’apprécier les formes, les mouvements, les signes, les textures, les microphénomènes ; une réalité qui se révèle à ceux qui sauront apprécier les instants propices à une rêverie. Et c’est bien durant des promenades que nous nous laissons attirer par des ponctuations, des envolées… des moments de purs plaisirs visuels.
Jochen Lempert appréhende avec beaucoup de douceur les petites choses qui impliquent une disponibilité du corps et de l’esprit. Au sortir de l’exposition demeurent en mémoire la poésie du vivant, la beauté d’une nature qui suscite la bienveillance, le respect. Ainsi, nous sommes potentiellement enclins à ralentir, à nous arrêter face à la diversité d’une biodiversité, parfois invisible… Et que les artistes sont à même de nous donner à voir.