Katinka Bock — Demain sous un autre jour
Oscillant entre traces et disparition, présence et absence, les œuvres de Katinka Bock activent des processus en même temps qu’elles témoignent de leur(s) action(s) dans le temps, notamment sur la matière.
Placée dans sa droite lignée, l’œuvre Le Lit (une nuit) témoigne à son tour, bien que sur un autre mode, d’une présence envolée : sur une plaque posée à même le parquet ancien recouvrant le sol du lieu, gît un matelas de terre portant les empreintes du corps devenu fantôme qui, durant toute une nuit, s’y coucha, et dont les mouvements furent ainsi saisis et figés dans ce lit qui pourrait aussi bien être celui d’une rivière.
Omniprésente dans le travail de Katinka Bock comme dans son exposition à Rosascape, l’absence fait écho à la dimension non seulement hors-temps, mais hors-champ, invisible, que l’on retrouve dans La Vie des autres, une bande-son créée en direct, composée de bruits divers évoquant l’univers domestique et dont la source, si elle peut se révéler identifiable, reste hors de portée du regard du visiteur. Tout comme le monde extérieur dans cette même pièce où les vitres ont été recouvertes d’une peinture bleue venant occulter la vue tout en produisant une lumière bleutée irradiant dans l’espace pendant la journée. Intitulée Blaue Stunde Raum4, l’œuvre résulte de l’impression sur les huit vitres d’autant de monotypes portant les traces d’objets trouvés par l’artiste dans la rue de l’espace d’exposition (cailloux, morceaux de verre, végétaux, etc.).
Composée de fils, lacets, bouts de tissu et autres câbles collectés dans Paris pendant un an par l’artiste, United for Paris pourrait symboliser cette tension entre passé et futur, mémoire et projection, indices et prémisses — et aussi, en l’occurrence, intérieur et extérieur — qui habite l’œuvre de Katinka Bock. Traversant l’espace, cette ligne faite de rebuts hétéroclites ayant littéralement noué des liens trace une symbolique skyline évoquant l’espace urbain en creux, en même temps qu’elle constitue une sorte de timelime, le fil étant progressivement déroulé au cours de l’exposition. Pour preuve, le tas de fils, visible mais hors-champ, se formant jour après jour sur le balcon…
1 Par ailleurs, l’exposition, en réservant une place non négligeable à la céramique, n’est pas sans faire écho aux pièces de l’artiste montrées à La Sucrière lors de la Biennale de Lyon 2011.
2 Theodora Domenech reprenant les mots de l’artiste à propos de l’œuvre « Danke » dans son texte « La Disparition et le don » publié à l’occasion de l’exposition.
3 Il s’agit d’une impression format A2 tirée à 1300 exemplaires et éditée dans le cadre du projet « Libelle° »
4 « Blaue Stunde Raum » fait également l’objet d’une édition de 8 monotypes sur papier, numérotés et signés.