Mark Lewis — Invention au Louvre
Point de vue
Article
Le 18 novembre 2014 — Par Guillaume Benoit
Avec Invention au Louvre, Mark Lewis propose, au sein même du musée et ce, jusqu’au 9 janvier 2015, un programme de vidéos hypnotiques qui invite à regarder autrement ses collections et encourage à repenser la valeur même du regard.
« Mark Lewis — Invention au Louvre », Le Louvre du 9 octobre 2014 au 31 août 2015.
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Mark Lewis trouve avec le Louvre un terrain de jeu à la hauteur de ses ambitions, son œuvre s’attachant depuis plus de vingt ans à organiser un dialogue fructueux entre peinture et cinéma. Un dialogue qui prend ici des allures d’exhortation à voir différemment ce qui se joue au sein du musée. Dans sa
Night Gallery, la lumière devient matière vivante et glisse sur la pierre à la manière d’une respiration étrange, modifiant l’objet de son attention et de notre visibilité. Zones d’ombre et fragments clairs, la caméra se fait œil d’un genre nouveau, capturant les fragments, détails vertigineux d’infimes histoires et multiplie les propositions de lecture inédite, usant de sa technique de
travelling pour inverser, troubler les perspectives et renvoyer
in fine la pyramide du Louvre à son essence géométrique ; objet dont chaque point, chaque angle peut se voir déplacé à condition que soit conservé ce que ses lignes contiennent. Le sol se fait ciel et les ombres des visiteurs se meuvent à l’écran en un ballet de lumière hypnotisant. Resserrer le cadre, orienter le regard, les œuvres de Mark Lewis participent toutes d’un besoin de penser à nouveau la perception de l’art.
Mark Lewis, Pyramid, 2014 — Film HD couleur, 8’18’’
Courtesy of the artist & ONF
À leur rythme, les vidéos de Mark Lewis dévoilent la majesté du Louvre et de l’art en capturant, au-delà de son gigantisme, l’infinie perspective emprisonnée dans le moindre de ses détails, glissant littéralement d’un plan à l’autre. S’il se joue des diagonales, imagine des lignes de fuite, l’artiste ne limite pas ses productions à un voyage onirique. Au contraire, les plans serrés d’œuvres picturales rejoignent le cœur bouillonnant et vivant d’un Louvre « patrimoine mondial ». En assumant cette double réalité, Mark Lewis tisse le lien entre l’art et son public ; les regards des visiteurs répondent aux supplications des personnages sur la toile, oscillant eux-même entre contemplation de l’objet et observation de l’objectif. Tableau vivant, reflet des mises en scènes sur les toiles, la cohorte des visiteurs se fait miroir d’un musée dont l’attraction se voit magnifiée par sa vie-même et révèle, en dernier lieu, l’une des plus belles finalités de l’art ; faire de ces créations les plus « exposées » au monde des œuvres qui ne peuvent s’épuiser par un seul regard.
Mark Lewis, In Search of the Blessed Ranieri — Film HD couleur, 29’
Courtesy of the artist & ONF