Forming the Loss in Darkness à la galerie Praz-Delavallade
Forming the Loss in Darkness n’est pas un hommage comme le précise le texte accompagnant l’exposition, il s’agirait plutôt d’un portrait de l’artiste américain David Wojnarowicz.
« Forming the Loss in Darkness — curated by Jo-ey Tang », Galerie Praz-Delavallade du 22 juin au 24 juillet 2013. En savoir plus Figure majeure de la scène artistique issue de l’East Village, rarement exposé en France, il s’est imposé comme un des artistes incontournables des années 80 notamment par son engagement critique envers la société américaine. L’exposition se construit autour de son film Beautiful People dans lequel nous pouvons entrevoir Jesse Hultberg se réveillant, se travestissant, hélant un taxi dans les rues de New York pour s’aventurer dans une forêt en périphérie de la ville. Une mélancolie se dégage de ces images noires et blanches et cette esthétique vintage fait rapidement place à l’absurdité de la situation. En effet, nous apercevons à présent ce personnage dûment accessoirisé, entrer dans un lac pour semblerait-il s’y suicider. Exaltation de la disparition, cynisme et vacuité de la situation, plusieurs interprétations sont envisageables. Quand soudain, l’artiste posant sa main sur l’eau apparaît en couleur et c’est justement ce passage qui permet à l’exposition de prendre place dans l’espace de la galerie.Les artistes — dont la plupart vivent à New York — ont été choisis pour leurs capacités à composer autour des notions de perte, de disparition, liés à la dimension « Darkness » du film Beautiful People. Ainsi, Untitled 2011, de Thomas Fougeirol dégage une impression de mouvement proche d’une bande passante vidéo dont une partie serait manquante. Et c’est aussi l’effet provoqué par les prélèvements de ciel réalisés par Carlos Reyes. Ben Schumacher évoque la notion de dispersion et ceci dans le choix même de sa légende : Five Rear Quarters, 2013, pare-brises arrières achetés sur Ebay envoyés au curateur qui seront distribués aux cinq artistes après l’exposition.
David Wojnarowicz s’est imposé comme un des artistes incontournables des années 80 notamment par son engagement critique envers la société américaine.
Il s’agit bien d’une disparition de l’œuvre qui ouvre également une réflexion sur l’existence d’un temps post-exposition. Que deviendront ces pare-brises quand l’exposition sera terminée ? Au même titre, que devient ce personnage s’enfonçant dans le lac ? Et quelle est la nature de cette disparition ?
Qu’elles se manifestent à travers une série d’anthropométries sur bâches plastiques, par le recouvrement d’un papier photosensible à l’aide d’un obscur cirage noir, sous forme de poèmes créés spécifiquement pour l’exposition, ou encore de flaques goudronnées figeant le réel en lien discret et amusé avec Memories That Smell Like Gasoline du même auteur, leurs propositions évoquent toutes un versant du caractère de David Wojnarowicz, mais c’est peut-être Elaine Cameron-Weir qui pourrait davantage nous renseigner sur les spécificités de ce personnage. En effet Egyptian Technologies, sa sculpture énigmatique prenant l’apparence d’une radio munie d’antennes téléscopiques est la seule à pouvoir véritablement capter les messages laissés par ses intimes sur son répondeur. Les mêmes qui vous accueillent dès l’entrée de l’exposition.