Paris Gallery Weekend 2022
Neuvième édition de la manifestation, Paris Gallery Weekend 2022 célèbre cette année encore la richesse de l’offre artistique des galeries parisiennes. Le temps d’un week-end, l’événement unit toutes ces forces singulières en dessinant à travers la ville (et dorénavant jusqu’en banlieue) des parcours encourageant chacune d’entre elles à mettre en avant son travail quotidien.
Sans imposer de thème, la manifestation constitue une occasion unique de célébrer cette liberté et de témoigner de l’engagement inamovible des galeries parisiennes pour un art de qualité. Un rapide tour d’horizon, forcément non exhaustif rend compte de cette vitalité avec, parmi les jeunes artistes à suivre, Carlotta Bailly-Borg et ses formes fantastiques peuplant un monde en devenir (galerie Praz-Delavallade), les icônes pop hallucinées dans une mythologie de la dalle à réinventer de Sara Sadik (galerie Crèvecœur) et la force fantastique des ruptures de tons et de couleurs d’Amoako Boafo (galerie Mariane Ibrahim).
On découvrira avec joie et intérêt l’installation obsédante et totale d’Allora & Calzadilla (galerie Chantal Crousel), la mise en scène soignée et onirique de Virginie Yassef (galerie GP & N Vallois), les tout aussi sidérantes formes minimalisées, pièges imaginaires aussi efficaces que fragiles de Gyan Panchal (galerie Marcelle Alix) ou le renversement conceptuel d’une démarche qui l’implique totalement de Leigh Ledare (galerie mfc-Michèle Didier).
Dans une veine plus éthérée, les images de Nelli Palomaki (galerie Les filles du calvaire) ralentissent la marche du temps pour se confronter à une obscurité qu’elle apprivoise quand Jaume Plensa fige les visages d’autres dans des dimensions spatio-temporelles qui échappent à la rationalité tout en s’en nourrissant essentiellement (galerie Lelong & Co.). Ted Larsen, lui, se réinvente autant qu’il repense notre rapport à l’œuvre plastique, usant des codes de la peinture pour élaborer son propre langage de sculpteur (galerie Dutko).
Des œuvres riches enfin, ayant traversé les époques se mesurent au regard d’un présent qui les remet à l’honneur et en découvre l’infinie richesse. C’est le cas des paysages hypnotiques organiques d’Eugène Leroy (galerie Almine Rech), des inventions formelles de la géométrie végétalisée de Pablo Reinoso (galerie Xippas), mais aussi des trouvailles de l’imaginaire sensible d’une technique aussi frontale qu’ancrée dans un système de relations complexes de l’œuvre singulière de Caroll Dunham (galerie Max Hetzler). Enfin, c’est l’avant-gardiste Vera Molnar que notre contemporanéité ne semble toujours pas avoir rattrapée (galerie Berthet-Aittouarès) qui bouclera en majesté ce tour succinct des multiples propositions de l’année.
De l’artiste émergent aux plus grands noms de la scène internationale, la galerie d’art constitue ainsi l’étalon commun d’une pratique qui ne se conclut que dans le partage, n’en déplaise aux contempteurs avides d’opposer les genres, les cultures et les classes sociales. L’opposition, l’ambiguïté et le dialogue y sont même, serait-on tenté de dire, les attributs essentiels, tendant à la société un miroir qui lui ressemble bien plus qu’elle ne le voudrait. A la différence toutefois que le débat, la discussion et les intérêts défendus se résolvent ici toujours dans l’invention, dans la création d’un biais capable de faire vivre de nouvelles idées.
Enrichissant nécessairement, de par sa forme plastique et la mise en jeu toujours frontale de l’œuvre exposée, la perspective adoptée par celui qui la perçoit, fort de sa liberté d’accompagner, de prolonger, d’augmenter ou de réfuter ce qu’il regarde, l’œuvre qui lui fait face.