Artist in Society — Galerie Rabouan Moussion
Avec Artist in Society, la galerie Rabouan Moussion ouvre une saison explosive où la contestation ne manque pas de ménager une place à la réflexion. Car derrière les créations à la violence frontale (la sculpture monumentale d’un cœur de Dimitri Tsykalov, les grenades sous fourrure de Kata Legrady) ou dont on peine même à voir le sens dans ce contexte (Erwin Olaf), l’exposition dessine des perspectives inquiétantes sur une réalité sociale dont l’artiste se fait agent révélateur.
« Artist in Society », Galerie Rabouan Moussion du 7 au 28 septembre 2013. En savoir plus Le propos, élevé notamment grâce au Double Vie d’Olga Kisseleva dépasse ainsi le cadre du simple « engagement » pour renverser la question sociale de l’artiste en observant dans quel rôle lui-même est engagé. Sur deux écrans, tandis qu’ils effectuent une tâche rébarbative, des artistes, créateurs et chercheurs du monde entier sont invités à raconter le métier qu’ils exercent pour subvenir à leur besoin, souvent bien éloigné de leur pratique artistique. Avec son dispositif, Olga Kisseleva, plus encore que la simple place de l’artiste, ouvre une fenêtre sur la place de la création dans l’organigramme social. Sans jugement ni considération hâtive, la question de la valeur « sociale » du travail de la pensée est ici posée avec une rare acuité ; l’artiste et le penseur deviennent ainsi ceux dont les « gestes » quotidiens sont autant de distances prises avec leurs pratiques personnelles tout aussi bien que ce qui les « fond » dans leur contexte social. Ainsi relégué par la société du côté de « l’intime », leur art n’appartient plus qu’à eux-mêmes.Une perspective qui trouve un terrible écho dans la photographie d’Oleg Kulik, symbole de ce renversement du
C’est dans cette régression vers l’animalité (Oleg Kulik parle de « simplification ») que l’homme échapperait à l’oppression rendue uniquement possible par les lois de la société. En ce sens, l’énoncé de l’exposition se voit objet d’un dernier renversement : il ne s’agit plus uniquement d’observer l’artiste dans la société mais bien d’apercevoir la possibilité d’une société déjà à l’œuvre dans la création de l’artiste.
Largement portée par ses deux figures de proue que sont Olga Kisseleva et Oleg Kulik, Artist in Society dessine donc un propos plus complexe qu’attendu et offre une réflexion renversante sur la société et ce malgré la relative lourdeur symbolique d’autres œuvres.