Lawrence Weiner — Galerie Marian Goodman
Conjointement, la galerie et la librairie Marian Goodman à Paris présente jusqu’au 21 décembre “Folded Waves Vagues Pliées”, une exposition de l’artiste américain internationalement établi, Lawrence Weiner.
« Lawrence Weiner — Folded Waves / Vagues Pliées », Galerie Marian Goodman du 3 novembre au 21 décembre 2018. En savoir plus Bien qu’on lui connaisse l’utilisation d’une variété de médiums (vidéo, livre, art sonore, sculpture, performance, etc.), Lawrence Weiner est une figure majeure de l’art conceptuel, plus particulièrement connu depuis la fin des années 1960 pour son utilisation graphique du langage. Abordé tel un matériau dans ses œuvres, la langue (toujours traduite selon le pays d’accueil) devient un terrain de jeu syntaxique qu’il décline au gré des lieux (site-specific, galerie, musée, etc.) et des surfaces (livres, multiples, merchandising) qu’il habite. Sans abandonner les codes, l’histoire et les outils propres au graphisme des supports de communication (affiche, édition, web), l’artiste questionne la plasticité du langage lui-même ainsi que la notion d’auto-référencement de l’œuvre d’art. Sa déclaration d’intention publiée en 1969 étaye son propos et définit sa ligne artistique à venir : « L’artiste peut réaliser la pièce ; la pièce peut être réalisée (par quelqu’un d’autre) ; la pièce peut ne pas être réalisée. Chaque proposition étant égale et en accord avec l’intention de l’artiste, le choix d’une des conditions de présentation relève du récepteur à l’occasion de la réception ».Directes, parfois impératives, les formules écrites de Lawrence Weiner sont souvent accompagnées de signes typographiques ou de lignes qui évoquent une forme de signalisation ; comme l’évocation d’une méthode de pensée à suivre ou d’une action à effectuer. Ces statements semblent être de mystérieuses interjections ; une campagne de publicité ou une propagande qui attise notre imagination et perturbe nos certitudes.
C’est ainsi que commence (et se termine presque aussitôt) l’exposition FOLDED WAVES VAGUES PLIÉES, avec une charte graphique reconnaissable, simple et colorée. À l’approche de la galerie dans la rue du Temple, on peut déjà repérer l’inscription « APRÈS ICI & LÀ / AFTER HERE & THERE » sur la vitrine de la librairie. Une fois à l’intérieur de la galerie, l’espace d’exposition semble avoir été pensé comme un livret de quelques pages. Lawrence Weiner a investi quatre murs de la galerie avec la formule qu’on lui connaît : en lettres capitales, des partitions de mots ou des fragments de phrases sont plaqués aux cimaises. Comme on feuillette un livre de poésie — composé de phrases esseulées et parsemé de zones blanches —, la déambulation est minimale et n’implique des sens que la vision. En immense, on peut lire « VAGUES PLIÉES DE MANIÈRE À LES RENDRE SÈCHES » sur le mur principal de la galerie.
Conceptuel, certes. Austère, un peu. Épuré, énormément. Mais comme évoqué précédemment, l’artiste ne délaisse pas la vue au profit du néant immatériel de la pensée ou de l’imagination ; au contraire. Ce facteur sensoriel reste primordiale et déterminant pour l’artiste dans la vie de son œuvre. L’expérience du spectateur intervient dans le statut même de l’œuvre et valide sa présence au monde confirme Lawrence Weiner : « Toutes les dates de mes pièces sont seulement la date de la première exposition publique, pas de la conception1.»
1 Rencontres 7 : Lawrence Weiner / Frank Perrin, Éditions Images Modernes, Paris, 2002